L'industrie
des eaux embouteillées est très concentrée puisque 3
groupes, Danone, Perrier-Vittel Groupe Nestlé et Castel,
réalisent environ 90% de la production nationale. Cependant,
avec l'essor des ventes d'eaux de source, les exploitations
de nouvelles sources se sont multipliées. Les petits
producteurs s'orientent généralement vers le segment
des premiers prix, soit sous leur propre marque, soit
pour le compte des distributeurs. Très peu réussissent
à percer à l'échelon national.
Les
leaders détiennent les principales marques d'eaux commercialisées
sur le marché français. Celles-ci génèrent d'importants
volumes de vente, mais leur part de marché s'est effritée
avec la percée des eaux régionales, des eaux premiers
prix et des MDD.
Les
eaux vendues à des prix bas sont soutenues par les distributeurs
qui génèrent des marges plus importantes sur ces produits.
Le linéaire des eaux est donc très dynamique compte
tenu de la concurrence entre les différents produits:
nombreux changements de packaging, déclinaison des gammes
existantes, lancement de nouvelles marques, campagnes
de communication...
Chaque
marque cherche à attirer le consommateur et, surtout,
à le fidéliser.
Le
secteur français des eaux embouteillées s'est en apparence
fragmenté industriellement et commercialement, avec
l'exploitation de nouvelles sources depuis quelques
années.
Selon
I'EAE, les 4 premières entreprises de la branche ont
cependant réalisé plus des trois quarts du chiffre d'affaires
total en 1993. La concentration financière est encore
plus forte puisque les leaders exploitent plusieurs
sociétés.
Elle
s'explique en outre par l'existence de barrières à l'entrée
(lourdeur des capitaux à investir, communication...).
|
10
à 19 Salariés |
20
à 49 Salariés |
50
à 99 Salariés |
100
à 499 Salariés |
500
et + Salariés |
Ensemble |
Nbr
d'entreprises |
12 |
17 |
5 |
7 |
4 |
45 |
Effectif
salarié |
184 |
529 |
338 |
1422 |
7433 |
9906 |
Chiffre
d'affaire (CAHT)* |
150,4 |
646,2 |
545,2 |
1720,7 |
9555,2 |
12627,7 |
Valeur
ajouté (VABCF)* |
38,8 |
143,6 |
174,9 |
555,7 |
3760,1 |
4673,1 |
Escéd.
brut d'exploit. (EBE)* |
6,7 |
48,3 |
108,1 |
279,6 |
1783,1 |
2225,8 |
Invest.
corporels* |
9,5 |
49,9 |
65,9 |
72,9 |
652,2 |
850,4 |
|
VABCF/CA |
25,8
% |
22,2
% |
32,1
% |
32,1
% |
39,4
% |
37,0
% |
EBE/VABCF |
17,4
% |
33,6
% |
61,8
% |
50,3
% |
47,4
% |
47,6
% |
Invest/VABCF |
24,5
% |
34,8
% |
37,7
% |
13,1
% |
17,3
% |
18,2
% |
* en millions de francs | L'industrie française de eaux
de table (Source AEA 1993)
La
concentration financière s'explique par l'importance
des barrières à l'entrée. Les coûts d'exploitation d'une
source sont en effet élevés. De même, la commercialisation
de l'eau nécessite souvent une forte politique de promotion
et de distribution .
Cette
concentration s'est par ailleurs renforcée en 1992 lors
du rachat de Perrier par Nestlé, après son entente avec
Danone (ex-BSN).
La
Commission de Bruxelles a toutefois oblige Nestlé à
mettre en vente certaines sources de Perrier afin d'éviter
un risque de duopole sur le marché français. Un nouvel
acteur d'importance est donc apparu avec le rachat de
ces sources : Castel. Au total, Nestlé Source International
(NSI, rebaptisé depuis peu Perrier-Vittel SA, groupe
Nestlé) et le Groupe Danone détiennent près des trois
quarts du marché des eaux embouteillées en volume.
Le
reste se répartit entre Castel (environ 15% du marché
en volume) et de nombreux petits exploitants.
Groupe
Danone
Le
portefeuille de marques du Groupe Danone se compose
essentiellement de grandes marques nationales : Evian,
Volvic, Arvie, Badoit, Salvetat, Mont Dore. Le groupe
Danone a vu ses parts de marché progresser de façon
significative ou début des années 90.
Le
groupe, qui représentait 21% du marché des eaux embouteillées
en 1991, en détient 33% actuellement. Le rachat de Volvic
en 1992 a été le principal moteur de cette croissance.
Par le biais de Volvic, le Groupe Danone a également
acquis la source d'eau minérale gazeuse d'Ardes sur
Couze, commercialisée sous le nom d'Arvie.
Enfin,
face à la montée en puissance des eaux de source, le
Groupe Danone a acheté en 1993 la Société des Sources
du Mont Dore. Danone commercialise également dans le
circuit des CHR la marque italienne Ferrarelle qui appartient
à sa filiale italienne, Italacquae. Le groupe Danone
exporte une part importante de sa production.
Les
marques Evian et Volvic sont les plus exportées.
Perrier
Vittel Groupe Nestlé
Le
groupe Nestlé a été le grand vainqueur du redécoupage
du marché français au début des années 90.
Grâce
à l'acquisition de deux grandes marques (Perrier et
Contrexéville), il est devenu le n°l des eaux embouteillées
sur le marché français.
On
estime aujourd'hui sa part de marché en volume à 39%,
contre 15% en 1991.
Portefeuille
de marques Perrier-Vittel Groupe Nestlé : Contrexéville,
Vittel, Hépar, Plancoët, Abatilles, Valvert, Quézac,
Perrier, Carola, Saint-Roch, Montclar, Saint-Alix.
Au
cours des dernières années. le Groupe Nestlé a cherché
à consolider ses positions sur le marché français des
eaux embouteillées en lançant deux grandes marques.
La
première, Valvert (eau importée de Belgique) lancée
en 1993, avait pour objectif de venir contrer le Groupe
Danone sur le segment des eaux minérales plates peu
minéralisées. La seconde, Quézac lancée en 1995, devrait
permettre au Groupe Nestlé de profiter de la croissance
du marché des eaux gazeuses, d'autant que le groupe
positionne de plus en plus sa marque Perrier sur le
segment des soft-drinks.
Enfin,
un accord de commercialisation a été passé entre Perrier-Vittel
Groupe Nestlé et San Pellegrino pour la distribution
de l'eau San Pellegrino en France et en Belgique.
Castel
L'émergence
du Groupe Castel, en tant que troisième force du marché
national des eaux embouteillées, est liée à une décision
de la Commission européenne.
L'acquisition
la plus importante de Castel a été la Société des Eaux
Minérales du bassin de Vichy (qui appartenait auparavant
au Groupe Nestlé).
Cela
lui a permis d'enrichir portefeuille d'une dizaine de
marques et de voir ses ventes doubler. Sa part de marché
en volume est actuellement d'environ 15%. Portefeuille
de marques Castel : Saint-Yorre, Vichy, CéIestins, Chateldon,
Rozana, Chateauneuf, La Verniére, Pierval, Thonon, Pierval,
Cristaline, Bondoire, Saint-Cyr en Val, Vélines, Neyrolles,
Ste Cecile.
Castel
a regroupé son pôle eaux au sein de la CGES (Compagnie
Générale des Eaux de Source). Cette dernière a confié
le marketing et la commercialisation de ses marques
à sa filiale, la SNC Neptune Distribution.
La
CGES ne commercialise qu'une seule grande marque d'eau
de source, Cristaline, en partenariat avec la société
de production Roxane.
Cristaline
est une marque fédératrice sous laquelle sont distribuées
une douzaine d'eaux de source.
Cette
stratégie permet à Castel et Roxane d'être présents
sur l'ensemble du territoire national. Notons que la
distribution de cette eau est assurée conjointement
par Roxane et la CGES en fonction de leur zone géographique
traditionnelle d'influence.
Les
autres producteurs
A
coté des leaders, de nombreux petits producteurs sont
présents sur le marché français des eaux embouteillées.
Cependant, à quelques exceptions près, leurs volumes
commercialisés restent relativement faibles.
Ils
commercialisent presque essentiellement des eaux premiers
prix, sous leur propre marque ou celle d'un distributeur,
qui génèrent donc une faible valeur ajoutée.
Cependant,
les distributeurs réalisent sur ces eaux des marges
plus importantes que sur les eaux minérales. Ces petits
producteurs distribuent généralernent leur eau au niveau
régional, très peu ont percé à l'échelon national en
raison de l'importance du ticket d'entrée.
A
titre d'exemple, les investissements publicitaires inhérents
ou lancement d'une marque sont estimés à environ 30
MF. En outre, ces eaux ne peuvent supporter des coûts
de transport élevés.
Selon
le Secrétaire Général du Syndicat des Eaux de Source,
la commercialisation d'une eau de source n'est économiquement
rentable que sur un rayon de 100 kilomètres (les frais
de transport sont compris entre 7 et 8 centimes par
bouteille de 1,5 litre).
Les
distributeurs propriétaires
Les
sociétés de la grande distribution alimentaire sont
rarement directement propriétaires d'une source d'eau.
la réglementation en vigueur leur interdisant la commercialisation
sous leur propre nom d'eau embouteillée. Intermarché
a cependant investi 140MF dans la construction d'une
usine d'embouteillage pour l'eau de source de Luchon.
La source reste cependant la propriété de la ville de
Luchon. Ce groupe possède de plus les eaux d'Aix les
Bains, Ste Marguerite, et embouteille de l'eau de source
sur ses deux sites de Prahecq et St Martin d'Abbat.
De
même, le distributeur Casino a conclu un accord avec
la Société des Eaux minérales Parot. Par cet accord
l'eau minérale gazeuse "Puits Saint-Georges" est devenue
concession exclusive de Casino pour une durée de 10
ans, Casino a pour objectif commercialiser 3 millions
de cols dans ses magasins.
A
moyen terme, on devrait observer de nouveaux mouvements
de concentration. L'exacerbation de la concurrence entretenue
par les grands groupes affaiblit les petits producteurs
qui doivent multiplier leurs investissements pour rester
dans la course (investissements de capacité, renouvellement
des emballages sous la pression écologique, protection
des sites contre la pollution, communication autour
de la marque...).
Nombre
d'entre eux ne pourront pas suivre longtemps cette évolution.
Les
mouvements les plus récents concernent les entreprises
suivantes :
- La
Société des Eaux de Pioule qui avaient déposé son
bilan a été rachetée.
- La
Société des Eaux minérales de Saint-Alban-les-Eaux
(30 MF de CA en 1994) a été reprise par un consortium
étranger constitué du belge Sunco et du néerlandais
Winters.
- La
CGES, filiale eaux du groupe Castel, s'est associée
à deux partenaires pour reprendre la société d'eau
de source "Eaux Vitale". La CGES intervient à hauteur
de 20% dans le capital.
- Mise
en liquidation judiciaire des Eaux de Saint-Antonin
qui ont souffert par deux fois d'une pollution des
eaux les obligeant à stopper la production.
- Rachat
des eaux de Ste Marguerite par Intermarché.
- Prise
de contrôle des Eaux de Montcalm par les Eaux de St
Amand.
En
outre, les grands minéraliers se sont engagés dans la
diversification de leurs sources et de leurs marques
et s'intéressent de près au marché des eaux de source.
Ils risquent en effet de buter sur les limites hydrologiques
de certaines nappes et de ne pas pouvoir répondre totalement
aux attentes des consommateurs, perdant alors des parts
de marché.
A
- Le
segment des eaux plates
L'évolution
enregistrée ces dernières années montre une érosion
progressive des grandes marques nationales. Bénéficiant
pourtant d'une forte image de marque, elles semblent
avoir été " victimes " d'une trop grande banalisation
du produit, et d'un positionnement - prix inadapté à
la nouvelle situation économique et, surtout, aux attentes
des consommateurs. Les grandes marques se sont rendu
compte que les consommateurs étaient insuffisamment
informés sur les bienfaits des eaux minérales, ce qui
les a détournés de ce produit.
|
Groupe |
PdM
en volume
en 1993 |
PdM
en volume
en 1994 |
Evian |
Danone |
17
% |
15,8
% |
Contrexéville |
Nestlé |
14,9
% |
14,7
% |
Volvic |
Danone |
13,
6 % |
12,8
% |
Vittel |
Nestlé |
12,9
% |
12,3
% |
Hépar |
Nestlé |
2,9
% |
3,1
% |
Valvert |
Nestlé |
0,8
% |
1,9
% |
Autres |
- |
37,9
% |
39,4
% |
dont
Cristaline |
Castel |
10,8
% |
8,4
% |
Le poids de marques d'eaux plates (Source Panel Distributeurs)
Cette
évolution s'est faite au profit des eaux de source et
des eaux premiers prix notamment. L'eau de source Cristaline
enregistre de très bonnes performances en raison de
sa diffusion au niveau national et des campagnes de
communication qui ont été menées par le Groupe Castel.
Les eaux de sources régionales ont aussi profité de
l'engouement des Français pour les produits régionaux
dans leur ensemble.
B
- Le
segment des eaux gazeuses
Le
segment des eaux gazeuses se caractérise par un extrême
degré de concentration puisque 7 à 8 marques génèrent
les 4/5 des volumes commercialises dans les GMS. Les
eaux de source gazéifiées et les MDD ne sont pas parvenues
à remettre en cause la suprématie des eaux minérales
gazeuses.
|
Groupe |
PdM
en volume
en 1993 |
PdM
en volume
en 1994 |
Badoit |
Danone |
27
% |
25
% |
Perrier |
Nestlé |
21
% |
25
% |
Saint-Yorre |
Neptune/Castel |
21
% |
15
% |
Vichy
Célestins |
Neptune/Castel |
7
% |
7
% |
Salvetat |
Danone |
6
% |
3,5
% |
Vitelloise |
Nestlé |
5
% |
2,5
% |
Arvie |
Danone |
- |
3
% |
Autres |
- |
13
% |
19
% |
Le poids de marques d'eaux gazeuses (Source Panel Distributeurs)
La stabilité relative des parts de marché des marques
est liée à un taux de fidélité aux marques supérieur
à celui enregistré sur le marché des eaux plates.
Ce
taux de fidélité est du à un positionnement - produit
beaucoup plus fort.
Les
ruptures de stocks ont donc un impact extrêmement négatif
sur le comportement du consommateur qui ne revient pas
toujours à sa marque de prédilection. Ainsi, chez Saint-Yorre,
les pertes de parts de marché entre 1992 et 1994 sont
essentiellement imputables aux ruptures de stocks.
Les
perspectives de croissance du marché (mais aussi les
limites hydrologiques de certaines nappes) ont incité
les grands minéraliers à développer leur offre. Au cours
des dernières années, 3 grandes marques ont ainsi été
lancées : La Salvetat en 1992 (Danone). Arvie (Danone)
et Quézac en 1995 (Nestlé). Au total, le linéaire des
eaux embouteillées reste dominé par quelques grandes
marques, malgré la pénétration des eaux régionales,
des eaux premiers prix et des MDD.
C
- Segmentation
du marché selon les marques
L'industrie
française des eaux embouteillées est donc concentrée
aux mains de quelques producteurs. malgré la présence
de nombreux petits exploitants de source.
Cette
suprématie se retrouve évidemment au niveau du partage
du marché entre les marques (seules les ventes réalisées
dans le circuit alimentaire - soit 80% du marché des
eaux embouteillées - sont considérées ici).
|